45
" ... dove trovare il tempo per leggere?
grave problema.
che non esiste.
nel momento in cui mi pongo il problema del tempo per leggere, vuol dire che quel che manca è la voglia. poiché, a ben vedere, nessuno ha mai tempo per leggere. né i piccoli, né gli adolescenti, né i grandi. la vita è un perenne ostacolo alla lettura.
"leggere? vorrei tanto, ma il lavoro, i bambini, la casa, non ho più tempo..."
"come la invidio, lei, che ha tempo per leggere!"
e perché questa donna, che lavora, fa la spesa, si occupa dei bambini, guida la macchina, ama tre uomini, frequenta il dentista, trasloca la settimana prossima, trova il tempo per leggere, e quel casto scapolo che vive di rendita, no?
il tempo per leggere è sempre tempo rubato. (come il tempo per scrivere, d'altronde, o il tempo per amare.)
rubato a cosa?
diciamo, al dovere di vivere.
[...]
il tempo per leggere, come il tempo per amare, dilata il tempo per vivere. "
― Daniel Pennac
47
" Since the dawn of education, the student considered as normal has been the student who puts up the least resistance to teaching, the one who doesn't call our knowledge into question or put our competency to the test, a student who already knows a lot, who is gifted with instant comprehension, who spares us searching for the access roads to his grey matter, a student with a natural urge to learn, who can stop being a kid in turmoil or a teenager with problems during our lessons, a student convinced from the cradle that he has to curb his appetites and emotions by exercising his reason if he doesn't want to live in a jungle filled with predators, a student confident that the intellectual life is a source of infinite pleasures that can be refined to the extreme when most other pleasures are doomed to monotonous repetition - in short, a student who has understod that knowledge is the only answer: the answer to the slavery in which ignorance wants to keep us, the sole consolation for our ontological loneliness. "
― Daniel Pennac , Chagrin d'école
51
" Il y a ceux qui n'ont jamais lu et qui s'en font une honte, ceux qui n'ont plus le temps de lire et qui en cultivent le regret, il y a ceux qui ne lisent pas de romans, mais des livres *utiles*, mais des essais, mais des ouvrages techniques, mais des biographies, mais des livres d'histoire, il y a ceux qui lisent tout et n'importe quoi, ceux qui "dévorent" et dont les yeux brillent, il y a ceux qui ne lisent que les classiques, monsieur, "car il n'est meilleur critique que le tamis du temps", ceux qui passent leur maturité à "relire", et ceux qui ont lu le dernier untel et le dernier tel autre, car il faut bien, monsieur, se tenir au courant...
Mais tous, tous, au nom de la nécessité de lire.
Le dogme. (p. 78-79) "
― Daniel Pennac , Comme un roman
54
" Il y a ceux que le malheur effondre. Il y a ceux qui en deviennent tout rêveurs. Il y a ceux qui parlent de tout et de rien au bord de la tombe, et ça continue dans la voiture, de tout et de rien, pas même du mort, de petits propos domestiques, il y a ceux qui se suicideront après et ça ne se voit pas sur leur visage, il y a ceux qui pleurent beaucoup et cicatrisent vite, ceux qui se noyent dans les larmes qu'ils versent, il y a ceux qui sont contents, débarrassés de quelqu'un, il y a ceux qui ne peuvent plus voir le mort, ils essayent mais ils ne peuvent plus, le mort a emporté son image, il y a ceux qui voient le mort partout, ils voudraient l'effacer, ils vendent ses nippes, brûlent ses photos, déménagent, changent de continent, rebelotent avec un vivant, mais rien à faire, le mort est toujours là, dans le rétroviseur, il y a ceux qui pique-niquent au cimetière et ceux qui le contournent parce qu'ils ont une tombe creusée dans la tête, il y a ceux qui ne mangent plus, il y a ceux qui boivent, il y a ceux qui se demandent si leur chagrin est authentique ou fabriqué, il y a ceux qui se tuent au travail et ceux qui prennent enfin des vacances, il y a ceux qui trouvent la mort scandaleuse et ceux qui la trouvent naturelle avec un âge pour, des circonstances qui font que, c'est la guerre, c'est la maladie, c'est la moto, la bagnole, l'époque, la vie, il y a ceux qui trouvent que la mort c'est la vie.
Et il y a ceux qui font n'importe quoi. Qui se mettent à courrir, par exemple. À courir comme s'ils ne devaient jamais plus s'arrêter. C'est mon cas. "
― Daniel Pennac , La fata carabina