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" Bien sûr ces changements de comportement culturel et l'invention de mumltiples diversions font partie d'un système économique qui me dépase. J'envisage ce système comme un bain dans une piscine anémiée, stérile, bondée, puant le chlore, en comparaison d'une délicieuse baignade dans un lac au fond des bois, la berge du lac bordée de nénuphars en fleurs où sont perchées de petites tortues, un ou deux hérons dans les grands pins ou dans l'eau peu profonde, quelques serpents d'eau parmi les massifs d'ajoncs, et quand vous plongez vous voyez les poissons qui se reposent immobiles sous les bûches dressées. Même les profondeurs obscures semblent séduisantes en comparaison d'une piscine, comme une promenade printanière sous la pluie dans les bois en comparaison d'une série télévisée où des gens se font descendre ou tabasser à New York ou à Los Angeles tandis que des durs à cuire enchaînent d'insipides répliques soi-disant spirituelles. "
― Jim Harrison , Off to the Side: A Memoir
6
" Voilà bientôt deux siècles que nous vivons avec la conception de l'artiste - qu'il soit sculpteur, poète, écrivain, peintre, compositeur (ou interprète) - en tant que héros romantique et isolé, marginal et souvent paria, un chaman sans portefeuille, un individu doté d'un souffle impressionnant, réel ou truqué, qui lui permet de gonfler son ego jusqu'aux dimensions d'un dirigeable afin de se prémunir contre les coups, réels ou imaginaires, que lui assènent ses concitoyens. Ce n'est pas le genre de personne prompte à reconnaître que nous sommes tous "comme des moutons sortis du droit chemin". Souvent doté d'un aplomb évident, il se croit unique, mais c'est en définitive le cas de tout le monde, à des degrés divers. "
― Jim Harrison , Off to the Side: A Memoir
9
" J'ai appris des autochtones américains que nous prouvons seulement notre appartenance à l'endroit où nous vivons sur terre en utilisant notre maison avec soin, sans la détruire. J'ai appris qu'on ne peut pas se sentir chez soi dans son corps, qui est la maison la plus authentique de chacun, quand on souhaite être ailleurs, et qu'il faut trouver par soi-même le lieu où l'on est déjà dans le monde naturel environnant. J'ai appris que dans mon travail de poète et de romancier il n'existe pas pour moi de chemin tracé à l'avance, et que j'écris le mieux en puisant dans mon expérience d'adolescent imitant les autochtones et partant vers une contrée où il n'y a pas de chemin. J'ai appris que je ne peux pas croire vraiment à une religion en niant la science pure ou les conclusions de mes propres observations du monde naturel. J'ai appris que regarder un pluvier des hautes terres ou une grue des ables est plus intéresant que de lire la meilleure critique à laquelle j'ai jamais eu droit. J'ai appris que je peux seulement conserver mon sens du caractère sacré de l'existence en reconnaissant mes propres limites et en renonçant à toute vanité. J'ai appris qu'on ne peut pas comprendre une autre culture tant qu'on tient à défendre la sienne coûte que coûte. Comme disaient les Sioux, "courage, seule la Terre est éternelle". Peu parmi les cent millions d'autres espèces sont douées de parole, si bien que nous devons parler et agir pour les défendre. Que nous ayons trahi nos autochtones devrait nous pousser de l'avant, tant pour eux que pour la terre que nous partageons. Si nous ne parvenons pas à comprendre que la réalité de la vie est un agrégat des perceptions et de la nature de toutes les espèces, nous sommes condamnés, ainsi que la terre que déjà nous assassinons. "
― Jim Harrison , Off to the Side: A Memoir