1
" Ce nom a d’ailleurs un double sens, qui se réfère encore à un autre symbolisme : dru ou deru, comme le latin robur, désigne à la fois la force et le chêne (en grec δρυς) ; d’autre part, vid est, comme en sanscrit, la sagesse ou la connaissance, assimilée à la vision, mais c’est aussi le gui ; ainsi, dru-vid est le gui du chêne, qui était en effet l’un des principaux symboles du Druidisme, et il est en même temps l’homme en qui réside la sagesse appuyée sur la force. De plus, la racine dru, comme on le voit par les formes sanscrites équivalentes dhru et dhri comporte encore l’idée de stabilité, qui est d’ailleurs un des sens du symbole de l’arbre en général et du chêne en particulier ; et ce sens de stabilité correspond ici très exactement à l’attitude du Sphinx au repos. "
― René Guénon , Spiritual Authority and Temporal Power
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" Chaque fois que le désordre s’accentue, le mouvement s’accélère, car on fait un pas de plus dans le sens du changement pur et de l’« instantanéité » ; c’est pourquoi, comme nous le disions plus haut, plus les éléments sociaux qui l’emportent sont d’un ordre inférieur, moins leur domination est durable. Comme tout ce qui n’a qu’une existence négative, le désordre se détruit lui-même ; c’est dans son excès même que peut se trouver le remède aux cas les plus désespérés, parce que la rapidité croissante du changement aura nécessairement un terme ; et, aujourd’hui, beaucoup ne commencent-ils pas à sentir plus ou moins confusément que les choses ne pourront continuer à aller ainsi indéfiniment ? "
― René Guénon , Spiritual Authority and Temporal Power
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" Qu’il n’en ait pas toujours été ainsi, le mot même de « clergé » en fournit la preuve, car, originairement, « clerc » ne signifie pas autre chose que « savant », et il s’oppose à « laïque », qui désigne l’homme du peuple, c’est-à-dire du « vulgaire », assimilé à l’ignorant ou au « profane », à qui on ne peut demander que de croire ce qu’il n’est pas capable de comprendre, parce que c’est là le seul moyen de le faire participer à la tradition dans la mesure de ses possibilités. Il est même curieux de noter que les gens qui, à notre époque, se font gloire de se dire « laïques », tout aussi bien que ceux qui se plaisent à s’intituler « agnostiques », et d’ailleurs ce sont souvent les mêmes, ne font en cela que se vanter de leur propre ignorance ; et pour qu’ils ne se rendent pas compte que tel est le sens des étiquettes dont ils se parent, il faut que cette ignorance soit en effet bien grande et vraiment irrémédiable. "
― René Guénon , Spiritual Authority and Temporal Power
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" La vérité est que c’est la royauté qui, par là, ouvrit inconsciemment le chemin à la Révolution, et que celle-ci, en la détruisant, ne fit qu’aller plus loin dans le sens du désordre où elle-même avait commencé à s’engager. En fait, partout dans le monde occidental, la bourgeoisie est parvenue à s’emparer du pouvoir, auquel la royauté l’avait tout d’abord fait participer indûment ; peu importe d’ailleurs qu’elle ait alors aboli la royauté comme en France, ou qu’elle l’ait laissée subsister nominalement comme en Angleterre ou ailleurs ; le résultat est le même dans tous les cas, et c’est le triomphe de l’« économique », sa suprématie proclamée ouvertement. Mais, à mesure qu’on s’enfonce dans la matérialité, l’instabilité s’accroît, les changements se produisent de plus en plus rapidement ; aussi le règne de la bourgeoisie ne pourra-t-il avoir qu’une assez courte durée, en comparaison de celle du régime auquel il a succédé ; et, comme l’usurpation appelle l’usurpation, après les Vaishyas, ce sont maintenant les Shûdras qui, à leur tour, aspirent à la domination : c’est là, très exactement, la signification du bolchevisme. "
― René Guénon , Spiritual Authority and Temporal Power
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" [...] le renversement des rapports peut s’exprimer de la façon suivante : au lieu de regarder l’ordre social tout entier comme dérivant de la religion, comme y étant suspendu en quelque sorte et ayant en elle son principe, ainsi qu’il en était dans la « Chrétienté » du moyen âge, et ainsi qu’il en est également dans l’Islam qui lui est fort comparable à cet égard, on ne veut aujourd’hui voir tout au plus dans la religion qu’un des éléments de l’ordre social, un élément parmi les autres et au même titre que les autres ; c’est l’asservissement du spirituel au temporel, ou même l’absorption de celui-là dans celui-ci, en attendant la complète négation du spirituel qui en est l’aboutissement inévitable. En effet, envisager les choses de cette façon revient forcément à « humaniser » la religion, nous voulons dire à la traiter comme un fait purement humain, d’ordre social ou mieux « sociologique » pour les uns, d’ordre plutôt psychologique pour les autres ; et alors, à vrai dire, ce n’est plus la religion, car celle-ci comporte essentiellement quelque chose de « supra-humain », faute de quoi nous ne sommes plus dans le domine spirituel, le temporel et l’humain étant en réalité identiques au fond, suivant ce que nous avons expliqué précédemment ; c’est donc là une véritable négation implicite de la religion et du spirituel, quelles que puissent être les apparences, de telle sorte que la négation explicite et avérée sera moins l’instauration d’un nouvel état de choses que la reconnaissance d’un fait accompli. "
― René Guénon , Spiritual Authority and Temporal Power
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" dru-vid, où la première racine signifie la force, et la seconde la sagesse [Ce nom a d’ailleurs un double sens, qui se réfère encore à un autre symbolisme : dru ou deru, comme le latin robur, désigne à la fois la force et le chêne (en grec δρυς) ; d’autre part, vid est, comme en sanscrit, la sagesse ou la connaissance, assimilée à la vision, mais c’est aussi le gui ; ainsi, dru-vid est le gui du chêne, qui était en effet l’un des principaux symboles du Druidisme, et il est en même temps l’homme en qui réside la sagesse appuyée sur la force. De plus, la racine dru, comme on le voit par les formes sanscrites équivalentes dhru et dhri comporte encore l’idée de stabilité, qui est d’ailleurs un des sens du symbole de l’arbre en général et du chêne en particulier ; et ce sens de stabilité correspond ici très exactement à l’attitude du Sphinx au repos.] "
― René Guénon , Spiritual Authority and Temporal Power