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" Spécialiste de cette époque et ne cherchant ni à réhabiliter le monarque ni, comme les autres, à le condamner, l’historien américain Marc Raeff relève les paradoxes de son règne : notamment, l’oppression de la censure et la répression contre les écrivains mais, en même temps, le surprenant essor de la culture et de la littérature russes, son véritable « Âge d’Or ». Jamais plus la Russie ne connaîtra, en un laps de temps aussi bref, une telle quantité de génies littéraires. D’un autre côté, le tsar fait la critique de l’œuvre de Pouchkine, il envoie Lermontov dans le Caucase, à la mort, expédie Herzen en exil, contraint Dostoïevski à monter sur l’échafaud pour, au dernier instant, le gracier. "
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" Alexandre Nevski a d’ailleurs toutes les raisons de penser que les « Allemands », comme on appelle alors tout ce qui vient d’Occident, constituent un danger plus effrayant que les Tatars. Les croisés occupent les territoires qu’ils conquièrent, ce que ne font pas les Tatars ; il y bâtissent des forteresses, des villes, s’emparent des terres. Les croisés, les « chiens-chevaliers » comme les nommera Marx, convertissent au catholicisme les populations soumises. Là encore, ils se distinguent des Tatars, très tolérants sur le plan religieux. "
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" Quelque huit millions de personnes sont ainsi soumises par une armée de trente mille cavaliers. Les historiens réfutent aujourd’hui les récits des contemporains sur les centaines de milliers de « païens sauvages », détruisant tout sur leur passage. La force principale des Mongols, leur « bombe atomique » est le cheval. Chaque cavalier se doit d’en posséder trois, un de rechange et un autre pour son bagage. Une armée, fût-elle de cent mille hommes (or, les chroniqueurs parlent de deux cent cinquante à trois cent mille), aurait besoin d’une quantité de chevaux telle qu’elle ne pourrait trouver à les nourrir que dans certaines régions bien délimitées de l’empire conquis. La première bataille opposant Russes et Tatars sur les bords de la Kalka s’achève, nous l’avons vu, par la victoire des envahisseurs. L’une des raisons en est le petit nombre des guerriers mongols (trente mille) qui donne l’illusion aux armées russo-polovtsiennes de la faiblesse ennemie. En conséquence, les princes n’ont pas besoin de s’unir ni de mener une action concertée. La faiblesse démographique des Mongols exclut, de la même façon, qu’ils occupent les territoires conquis. "
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" La Russie d’Alexandre III appartient indubitablement au club très fermé des grandes puissances. Ses dimensions (elles s’agrandiront encore sous le règne de ce tsar épris de paix), sa population (de cent vingt-neuf millions de personnes selon le premier recensement général de 1897), en sont des preuves convaincantes. Dans la période qui suit les réformes, le pays se développe rapidement sur le plan industriel. Entre 1860 et 1913, l’augmentation de la production est de 5 % en moyenne, et dans les années 1890, elle atteint presque les 8 %. L’essor économique, fortement stimulé sous le règne d’Alexandre III, se poursuivra, à une cadence non moins rapide sous celui de son fils, Nicolas II. En 1914, la Russie sera la quatrième puissance industrielle, son commerce extérieur la placera au sixième rang mondial. "
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" L’historien américain Mark Raeff réfute l’idée d’un danger menaçant la principauté, puis l’État moscovite, entre le XIVe et le XVe siècles ; il recourt, pour caractériser la politique de Moscou, à une notion utilisée par les chercheurs spécialistes de la Rome antique : « L’impérialisme défensif », qui définit l’expansionnisme de la Ville éternelle, d’abord en Italie, puis de plus en plus loin. Car chaque territoire nouvellement acquis a des voisins qui, à leur tour, représentent une menace ; du moins faut-il le croire, puisqu’ils deviennent la cible de la prochaine conquête. "
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