Home > Work > Energy and Equity
1 " Beyond a certain speed, motorized vehicles create remoteness which they alone can shrink. They create distances for all and shrink them for only a few. A new dirt road through the wilderness brings the city within view, but not within reach, of most Brazilian subsistence farmers. The new expressway expands Chicago, but it sucks those who are well-wheeled away from a downtown that decays into a ghetto. "
― Ivan Illich , Energy and Equity
2 " Avec un vélo, l'homme peut partager les bienfaits d'une conquête technique sans prétendre régenter les horaires, l'espace ou l'énergie d'autrui. Un cycliste est maître de sa propre mobilité sans empiéter sur celle des autres. Ce nouvel outil ne crée que des besoins qu'il peut satisfaire, au lieu que chaque accroissement de l'accélération produit par des véhicules à moteur crée de nouvelles exigences de temps et d'espace. "
3 " Participatory democracy demands low-energy technology, and free people must travel the road to productive social relations at the speed of a bicycle. "
4 " Même si on découvrait une source d'énergie propre et abondante, la consommation massive d'énergie aurait toujours sur le corps social le même effet que l'intoxication par une drogue physiquement inoffensive, mais psychiquement asservissante. "
5 " L'Américain moyen consacre plus de mille six cents heures par an à sa voiture. Il y est assis, qu'elle soit en marche ou à l'arrêt ; il la gare ou cherche à le faire ; il travaille pour payer le premier versement comptant ou les traites mensuelles, l'essence, les péages, l'assurance, les impôts et les contraventions. De ses seize heures de veille chaque jour, il en donne quatre à sa voiture, qu'il l'utilise ou qu'il gagne les moyens de le faire. Ce chiffre ne comprend même pas le temps absorbé par des activités secondaires imposées par la circulation : le temps passé à l'hôpital, au tribunal ou au garage, le temps passé à étudier la publicité automobile ou à recueillir des conseils pour acheter la prochaine fois une meilleure bagnole. "
6 " L'industrie du transport façonne son produit : l'usage. Chassé du monde où les personnes sont douées d'autonomie, il a aussi perdu l'impression de se trouver au centre du monde. Il a conscience de manque de plus en plus de temps, bien qu'il utilise chaque jour la voiture, le train, l'autobus, le métro et l'ascenseur, le tout pour franchir en moyenne trente kilomètres, souvent dans un rayon de moins de dix kilomètres. Le sol se dérobe sous ses pieds, il est cloué à la roue. Qu'il prenne le métro ou l'avion, il a toujours le sentiment d'avancer moins vite ou moins bien que les autres et il est jaloux des raccourcis qu'empruntent les privilégiés pour échapper à l'exaspération créée par la circulation. Enchaîné à l'horaire de son train de banlieue, il rêve d'avoir une auto. Épuisé par les embouteillages aux heures de pointe, il envie le riche qui se déplace à contre-sens. Il paie sa voiture de sa poche, mais il sait trop bien que le PDG utilise les voitures de l'entreprise, fait passer son essence dans les frais généraux ou se fait louer une voiture sans bourse délier. L'usager se trouve tout au bas de l'échelle où sans cesse augmentent l'inégalité, le manque de temps et sa propre impuissance, mais pour y mettre fin il s'accroche à l'espoir fou d'obtenir plus de la même chose : une circulation améliorée par des transports plus rapides. Il réclame des améliorations techniques des véhicules, des voies de circulation et des horaires ; ou bien il appelle de ses vœux une révolution qui organise des transports publics rapides en nationalisant les moyens de transport. Jamais il ne calcule le prix qu'il lui en coûtera pour être ainsi véhiculé dans un avenir meilleur. Il oublie que de toute accélération supplémentaire il payera lui-même la facture, sous forme d'impôts directs ou de taxes multiples. Il ne mesure pas le coût indirect du remplacement des voitures privées par des transports publics aussi rapides. Il est incapable d'imaginer les avantages apportés par l'abandon de l'automobile et le recours à la force musculaire de chacun. "
7 " Passé un certain point, plus d'énergie signifie moins d'équité. Au rythme du plus rapide moyen de transport, on voit gonfler le traitement de faveur réservé à quelques-uns aux frais des autres. "
8 " La consommation obligatoire d'un bien qui consomme beaucoup d'énergie (le transport motorisé) restreint les conditions de jouissance d'une valeur d'usage surabondante (la capacité innée de transit). La circulation nous offre l'exemple d'une loi économique générale : tout produit industriel dont la consommation par personne dépasse un niveau donné exercice un monopole radical sur la satisfaction d'un besoin. Passé un certain seuil, l'école obligatoire ferme l'accès au savoir, le système de soins médicaux détruit les sources non thérapeutique de la santé, le transport paralyse la circulation. "
9 " À bicyclette, l'homme va de trois à quatre fois plus vite qu'à pied, tout en dépensant cinq fois moins d'énergie. En terrain plat, il lui suffit alors de dépenser 0,15 calorie pour transporter un gramme de son corps sur un kilomètre. La bicyclette est un outil parfait qui permet à l'homme d'utiliser au mieux son énergie métabolique pour se mouvoir : ainsi outillé, l'homme dépasse le rendement de toutes les machines et celui de tous les animaux. "
10 " Le vélo élève la mobilité autogène de l'homme jusqu'à un nouveau degré, au-delà duquel il n'y a plus en théorie de progrès possible. À l'opposé, la cabine individuelle accélérée a rendu les sociétés capables de s'engager dans un rituel de la vitesse qui progressivement les paralyse. "