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" Le gouverneur : Votre gouverneur vous salue et se réjouit de vous voir assemblés comme de coutume en ces lieux, au milieu des occupations qui font la richesse et la paix de Cadix. Non, décidément, rien n’est changé et cela est bon ! Le changement m’irrite, j’aime mes habitudes !

Un homme du peuple : Non, gouverneur, rien n’est vraiment changé, nous autres, pauvres, pouvons te l’assurer. Les fins de mois sont bien justes. L’oignon, l’olive et le pain font notre subsistance et quant à la poule au pot, nous sommes contents de savoir que d’autres que nous la mangent toujours le dimanche. Ce matin, il y a eu du bruit dans la ville et au-dessus de la ville. En vérité, nous avons eu peur. Nous avons eu peur que quelque chose fût changé, et que tout d’un coup les misérables fussent contraints à se nourrir de chocolat. Mais par tes soins, bon gouverneur, on nous annonça qu’il ne s’était rien passé et que nos oreilles avaient mal entendu. Du coup, nous voici rassurés avec toi. "

Albert Camus , L'état de siège


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Albert Camus quote : Le gouverneur : Votre gouverneur vous salue et se réjouit de vous voir assemblés comme de coutume en ces lieux, au milieu des occupations qui font la richesse et la paix de Cadix. Non, décidément, rien n’est changé et cela est bon ! Le changement m’irrite, j’aime mes habitudes !<br /><br />Un homme du peuple : Non, gouverneur, rien n’est vraiment changé, nous autres, pauvres, pouvons te l’assurer. Les fins de mois sont bien justes. L’oignon, l’olive et le pain font notre subsistance et quant à la poule au pot, nous sommes contents de savoir que d’autres que nous la mangent toujours le dimanche. Ce matin, il y a eu du bruit dans la ville et au-dessus de la ville. En vérité, nous avons eu peur. Nous avons eu peur que quelque chose fût changé, et que tout d’un coup les misérables fussent contraints à se nourrir de chocolat. Mais par tes soins, bon gouverneur, on nous annonça qu’il ne s’était rien passé et que nos oreilles avaient mal entendu. Du coup, nous voici rassurés avec toi.